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Réponse à une interrogation sur le célibat des prêtres.
Contrairement à ce qu'affirme le Vatican, le célibat des prêtres n'a rien d'évangélique ou de biblique.
Il est un simple fait de droit féodal en l'occurrence.
2003-08-27
Initialement dans la religion hébraïque de l'époque classique (premier millénaire avant J.C.), les prêtres juifs du Temple de Jérusalem étaient mariés et devaient cependant s'abstenir de toutes relations sexuelles pendant leur « tour de service » au Temple qui durait un mois par an ; ce n'était donc pas si terrible ... Ce souci d'abstinence était lié non pas à une notion de péché dans « l'acte de chair » comme on le perçoit dans certains textes du Judéo-christianisme (voir Psaume 51, verset 7), mais plutôt à un désir de pureté rituelle comme dans les règles alimentaires du « Casher » des Juifs.
Mais le fait religieux en cause devint dépourvu de toute conséquence à partir de 70 après J.C, du fait de la destruction du Temple de Jérusalem par les armées romaines de Titus.
Par la suite les adeptes du Christianisme deviennent numériquement plus nombreux que le peuple juif (à partir du premier siècle) et sont dirigés par des « Presbutéroï » (en Grec « les plus anciens » et d'où dérive le mot « prêtre »). Ceux-ci animent à plusieurs les communautés locales tels un conseil de paroisse.
Les « Presbutéroï » sont eux-mêmes regroupés sous l'autorité d'un « Episcopos » (en Grec : « le surveillant » et d'où est tiré le mot « évêque ») qui est unique pour chaque communauté. Les « Presbutéroï » sont des bénévoles (en principe) ; ils sont mariés et pourvus d'un métier laïc. Le mode de désignation de ces « Presbutéroï » est la cooptation par la communauté, tandis que c'est les « Presbutéroï » qui élisent leur « Episcopos » en leur sein (sachant que du temps très primitif de St. Paul, celui-ci désignait lui-même les « Episcopoï » de ses communautés récemment fondées).
Comme ils célèbrent la sainte Cène (communion) où ils sont censés manipuler le corps du Christ, les règles de pureté rituelle se posent encore. Mais elles sont peu à peu occultées dans les esprits ou négligées, sachant que (volontairement) certains « presbutéroï » se consacrent au célibat, mais ce n'est pas une obligation ... Les ordres monastiques se créent alors progressivement à partir de religieux ayant renoncé au monde et opté pour le célibat, mais sans desservir une paroisse.
Au cours des âges dits « barbares » qui s'écoulent de la chute de Rome (476 après J.C.) jusqu'au Moyen-âge féodal (10e siècle après J.C.), l'Église se voit dotée de richesses somptueuses et de terres agricoles du fait des donations et legs divers. Ces biens rapportent un argent considérable du fait qu'ils sont loués à des exploitants agricoles qui paient parfois en nature (livraison de nourriture et boisson) ou bien en solides deniers.
On se situe maintenant pour l'exposé vers le dixième siècle sur le territoire français.
Les biens fonciers d'Église sont alors généralement administrés par des communautés de moines célibataires qui vivent en structure collective (monastère) et qui pratiquent souvent les « bonnes oeuvres » (hospices), ou par des nobles d'Église (type comte-évêque) immergés dans le « siècle », c'est à dire le reste de la population, et qui eux sont plutôt préoccupés de leur bonne vie et de la recherche du luxe ... Ces nobles d'Église sont nommés par le pape et font assurer le « service » religieux par des prêtres de paroisse qu'ils nomment à leur tour. Les séminaires n'existent pas, bien entendu, et les bons curés sont formés « sur le tas ». Et bien tous ces gens d'Église peuvent se marier, mais n'ont pas le droit de donner leur succession à leur héritier mâle. C'est que les places d'évêque et de curé se vendent tel une « charge » de notaire ou un « fond » de pharmacie de nos jours ...
La charge d'évêque s'achète auprès du Pape et celle de curé (considéré au sens féodal comme un vassal de l'évêque) auprès de l'évêque correspondant. Le coût d'achat de la charge (plus fort, bien sur, pour celle d'évêque) est largement amorti par les revenus qui en découlent du fait des biens fonciers attachés au territoire dévolus à l'homme d'Église. Celui-ci vit de ces revenus.
Ce procédé en apparence peu moral (bien que conservé par notre « bonne » République en ce qui concerne les notaires et les huissiers) n'est que l'application au clergé du Droit féodal de l'époque qui prévoit que les fiefs (vocation à occuper des biens fonciers) et les titres de noblesse y afférant peuvent s'acquérir par voie financière. On est alors bien loin des temps héroïques de Charlemagne où les titres de noblesse et les fiefs ne pouvaient s'acquérir que l'épée au poing, par la valeur militaire. L'évolution avait été progressive depuis ces huitième-neuvième siècles sanguinaires, peut-être du fait de la relative stabilisation de la société civile qui rendait moins utiles les seules vertus guerrières !
Donc les titres de noblesse civils s'achetaient auprès du suzerain direct (noble de rang immédiatement supérieur) selon le principe du pyramidage féodal et le roi était en principe élus par les grands vassaux du royaume.
Les comtes achetaient leur titre auprès du roi, les barons auprès du comte, les chevaliers auprès de leur baron. Toutefois le fait d'être armé chevalier imposait en sus un rituel initiatique appelé « adoubement ».
Or un fait nouveau va se produire au cours du onzième siècle : les rois français tendent à rendre leur royauté héréditaire (« Y'a bon, Banania », dirait l'humoriste) et en échange acceptent le principe de la dévolution héréditaire des titres de noblesse et des territoires y afférant.
Tout le monde y trouve son compte : le roi qui est désormais sûr de voir son fils chéri avoir « la bonne place » à son tour et les seigneurs qui bénéficient du même avantage, sans risque financier.
En effet chaque seigneur peut désormais garantir à son fils aîné mâle l'obtention postérieure de la place qui était celle de son père, au lieu de devoir l'acheter auprès du suzerain, avec le risque de manquer d'argent à ce moment ou de voir le dit suzerain vendre le « poste » à l'un des ses copains ... Et oui, les nobles et la famille royale française qui se targuent tant de leurs aïeux et de leur succession héréditaire qu'ils protègent avec force, n'ont obtenu cette hérédité que vers le onzième siècle ...
Donc, la noblesse d'Église qui doit appliquer le nouveau Droit féodal aurait dû, elle-aussi, assurer le transfert de ses titres (évêque et curé) par voie héréditaire au décès ou lors du renoncement du titulaire.
Tout va bien dans la noblesse civile, mais cela ne fait pas l'affaire du pape qui, lui, est élu à Rome et doit acheter chèrement les suffrages de ses cardinaux électeurs s'il veut « passer », lorsqu'il postule au « trône de St. Pierre » après la mort de son prédécesseur ...
C'est les moeurs du Moyen-âge, n'en soyons pas choqué ... Le pape élu se rattrape ensuite en vendant fort cher les charges d'évêque ; c'est lui et non le roi de France qui détient le droit de nommer les évêques ! Il n'est pas question, face au reste du monde chrétien, de rendre le titre de pape héréditaire.
Donc, il faut que le principe de la vente des « charges » religieuses épiscopales et de paroisse reste de règle, sinon le pape ne serait pas d'accord car subissant une terrible perte financière.
Or il détient le pouvoir terrible à l'époque d'excommunier le roi ... L'excommunication du roi entraînait l'autorisation pour ses sujets de ne plus lui obéir, c'est donc un châtiment effroyable et le roi de France redoute de contrer le pape !
Hors en France, il n'y a qu'un seul droit féodal garanti par l'épée du roi !
Donc, la solution découle de source : le pape et le roi de France tombent d'accord pour faire en sorte que les fils de curés et d'évêques soit désormais des « bâtards » et ne puissent prétendre à hériter de leur père. En effet selon le Droit féodal, le bâtard n'avait droit à rien et ni le roi ni le pape ne se faisaient d'illusions sur la « continence » des hommes d'Église de l'époque.
Donc on a interdit le mariage des prêtres et subséquemment des évêques (l'évêque étant avant tout un prêtre élevé au rang de l'épiscopat) pour que leurs fils soient des bâtards dépourvus de tout droit héréditaire.
L'opération canonique se déroule en deux temps :
-- 1123, sous le pontificat du Pape Calliste II : le premier Concile du Latran décrète que les mariages avec des hommes d'Église sont invalides.
-- 1139, sous le pontificat du Pape Innocent II : le second Concile du Latran confirme le décret du Concile précédent.
Donc tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles.
À noter un point de Droit canonique (c'est à dire religieux) important : c'est le célibat et non la « chasteté » qui fut imposé aux prêtres et évêques. La dite chasteté n'était de règle que dans les ordres monastiques cloîtrés.
Ainsi, les hommes d'Église conservent le droit d'avoir des concubines (de « niquer » pour parler plus franchement), mais n'ont désormais plus le droit de faire reconnaître leur concubine comme épouse dans les registres paroissiaux (les seuls légaux, l'état-civil républicain n'existant pas alors et pour cause).
En effet, le sexe n'est pas encore déclaré péché mortel à l'époque (pas plus que la fameuse « impureté » solitaire des garçons tant décriée par les confesseurs catholiques) ; cela viendra plus tard. Donc les prêtres et les évêques pouvaient « baiser » tout leur saoul, sachant que le produit éventuel de ces amours parallèles n'aurait pas « voix au chapitre » même si c'était un mâle. Il ne pourrait en aucune façon hériter de la charge paternelle et devrait alors trouver un autre « boulot »... À la mort du titulaire, cette charge resterait à vendre au bon profit de l'évêque et « in fine » du pape.
Ces hommes d'Église n'offensaient pas Dieu pour autant !
Les charges d'Église restaient ainsi toujours vendables au plus offrant, par cette astuce canonique, sans pour autant déroger au Droit féodal du roi.
Mais, hélas, il existe toujours des empêcheurs de tourner (ou de « baiser ») en rond ...
Voilà donc qu'en 1517 ce bon Martin Luther fait « péter » dans la gueule du pape Léon X ses 95 thèses contre la « vertu des indulgences », placardées sur les portes de la cathédrale de Wittenberg. Et c'est la rupture avec Rome, et le point de départ du Protestantisme institutionnel, (si l'on excepte la minorité vaudoise peu active dans l'Histoire). Ce Protestantisme sera aussi appelé « la Réforme ».
Or le grief principal que soulèveront Luther, Calvin et leurs successeurs contre l'Église de Rome est la paillardise de ce clergé catholique (y inclus les papes de l'époque) ainsi que le luxe dans lequel il vit.
Au cours des années qui suivent, c'est les atroces guerres de religion et la peur des papes de voir leur « troupeau » leur échapper des doigts.
Les papes vont alors se lancer dans une terrible lutte d'influence spirituelle pour tenter de regagner leur honorabilité. Il fallait alors montrer que la Papauté n'avait pas de leçon de morale à recevoir des Protestants.
Le pape Paul III convoque en 1542 un concile qui restera connu dans l'Histoire sous le vocable de « Concile de Trente », du nom de la ville où il démarra. Après bien des avatars et interruptions successives il s'acheva (enfin) sous Pie V en 1563. Ce long concile allait avoir des conséquences terribles au niveau de l'équilibre psychologique des âmes naïves dans les siècles futurs.
Ceci dit, il allait avoir pour conséquence première que le sexe était désormais érigé par le pape au rang de péché mortel, au même titre que le meurtre. Pour les non-initiés, rappelons que le Droit « canon » divise les péchés des hommes en deux catégories : les véniels et les mortels.
Les « véniels » sont ceux qui « ne tuent pas la Grâce rédemptrice » et donc ne conduisent pas à l'Enfer automatique si le coupable meurt avant d'avoir pu se confesser. Par exemple, le vol même avec violence (s'il n'y a pas mort de la victime) reste considéré par l'Église comme un péché véniel ...
Les « mortels » tuent la dite Grâce (d'où leur nom) et donc impliquent pour le pécheur la condamnation quasi-automatique au supplice éternel de l'Enfer s'il vient à mourir sans s'être confessé. Il s'agit par exemple du meurtre volontaire ou du blasphème.
Donc, maintenant, après les décrets tridentins (de Trente), le sexe hors mariage devenait un péché mortel tout comme l'homicide et donc se trouvait interdit aux laïques comme au clergé.
Le célibat des prêtres se trouvait désormais fortement ancré et n'était plus susceptible de la consolation du concubinage, bien qu'en Droit pur, la chasteté ne soit officiellement pas inscrite dans les obligations du prêtre séculier.
Cela ne serait pas si grave si une telle décision n'avait eu pour résultat postérieur de rendre infernale (c'est le cas de le dire) la vie de prêtres capables et zélés, mais un peu faibles sur le plan de la « Chair ».
Démission, vie parallèle, enfant dissimulé, suicide ... Ou même homosexualité et pédophilie, voilà le prix imposé par les conciles de Latran et surtout de Trente.
Et aussi la peur panique de ces adolescents trop naïfs élevés dans les instituts catholiques bornés et qui se croyaient dignes de l'Enfer parce qu'ils s'étaient fait une pauvre petite « gâterie » solitaire sous leurs draps ... Névrose, impuissance future, difficulté d'adaptation ; merci aux « très saints pères » Paul III et Pie V.
Que l'on se rappelle (ce n'est pas si vieux ) la bulle « Humanae Vitae » de Paul VI (1968) et ses diatribes contre la pilule ! Rome n'est décidément pas sorti de l'époque tridentine et de ses coups de « canon » contre les Protestants qui se fichaient bien d'elle ...
On se rappellera que dans l'Église d'Orient dite aussi Orthodoxe, tout aussi vénérable et estimable que celle de Rome, les prêtres appelés « popes » ont conservé le droit de se marier, car cette digne Église n'est plus concernée par les conciles catholiques depuis la séparation de 1054 imposée par le pape romain.
Donc dans l'Église Orthodoxe, les candidats-popes mariés gardent leur femme lorsqu'ils accèdent à la prêtrise. Mais s'ils sont célibataires au moment du passage, ils le restent. C'est une coutume, plus qu'une obligation ... Si malheureusement ils perdent leur femme, la coutume veut là-aussi qu'ils ne se remarient pas. Les évêques sont exclusivement choisis parmi les célibataires ou les veufs. Les moines orthodoxes (souvent très pieux) sont tenus au voeu de célibat comme leurs homologues catholiques. Bien que partiellement contraignante, cette coutume semble plus libérale que le dogme catholique.
Les pasteurs protestants sont absolument libres de se marier et de se remarier si leur épouse décède. L'usage « huguenot » veut même que le pasteur (ou la femme-pasteur, cela existe chez eux) soit de préférence marié, car son conjoint le décharge ainsi des corvées ménagères afin qu'il soit plus disponible pour ses ouailles. Pardon pour les féministes ...
En sus, l'épouse du pasteur assume des tâches annexes intéressantes : instruction religieuse des enfants, veille sociale de sa paroisse, visite des malades de la communauté, etc ...
À propos du « septième sacrement » catholique de mariage, proclamé indissoluble par tous les papes contemporains, celui-ci n'est qu'une création du quatrième concile du Latran (1215 - pape Innocent III). Pour mémoire, ce concile est aussi celui qui condamnera à mort les malheureux « hérétiques » Albigeois, dits aussi Cathares. Jusqu'alors, un peu comme actuellement chez les protestants, le mariage à l'Église n'était qu'une cérémonie symbolique destinée à rendre publique devant la communauté l'union de deux conjoints. Il pouvait donc être révoqué comme un contrat civil mais seulement en cas de motif grave, bien sûr.
Et voilà que là-dessus l'Église Catholique persécute ses propres divorcés remariés en oubliant que son fameux « sacrement » ne date que de 1215 ...
Dieu (en admettant qu'il puisse exister ...) change-t-il d'avis au cours des siècles ?
Chez les Juifs, le mariage à la synagogue est aussi une cérémonie publique de reconnaissance officielle d'une union entre deux conjoints. Cet acte public considéré comme un « contrat » peut donc être révoqué en cas de faute de l'un des deux partenaires ou d'impossibilité légale. Il n'y a pas de péché mortel de rupture du « lien sacré » ; on retrouve ainsi la forme de pensée du Protestantisme.
On se targue quelquefois dans l'Église Catholique du célibat de Jésus-Christ en disant que celui-ci est le modèle de celui du prêtre. C'est un peu oublier que ce célibat original résultait alors d'un voeu rituel juif dit de « naziréat » (sic) prononcé par Jésus. Ce voeu consistait à promettre à son Dieu une vie de pénitence relative dont l'abstention sexuelle, jusqu'à réalisation d'un projet donné mené avec l'aide de Celui-ci. Pour Jésus c'était la liberté de son peuple juif occupé par les Romains et (selon les écrits postérieurs) l'avènement du « Royaume de Dieu ». Ce voeu n'était pas définitif, mais pour un temps donné.
Les apôtres étaient mariés, puisqu'à l'époque le fait de ne pas l'être les aurait fait considérer comme des anormaux ou des malades. Jésus ne guérit-il pas (selon la légende évangélique) la belle-mère de Pierre gravement malade ?
Ne comparons pas ce qui n'est pas comparable, Messieurs les secrétaires d'État du Vatican ...
Pour conclure et en pensant affectueusement à ceux qui ont encore la force de croire en l'Église Catholique, on pourrait dire :
Quand donc les papes accepteront-ils de dissocier ce qui est de Dieu (si on croit en cette autorité) et ce qui est des hommes : à savoir une simple règle très triviale de Droit féodal et successoral ? Une histoire de « fric » en somme !
Là, c'est plutôt les hasards de l'Histoire. Il faut restituer le contexte.
Les rois de France (les capétiens à partir de Hugues Capet) ont réussi à rendre héréditaire leur trône de manière subtile en faisant élire de leur vivant puis sacrer leur aîné mâle dès l'enfance. Ils rendent ainsi incontournable l'accession de celui-ci au trône lors de la disparition du père. L'argument habile employé est qu'ainsi le jeune « dauphin » peut mieux se préparer à son futur métier de roi dès l'enfance. Il n'y a plus le risque de voir un « aventurier » occuper le trône, ni celui de sanglantes luttes de clans analogues à celles de l'Empire romain pour s'octroyer le trône vacant au décès du roi (stabilité assurée) ...
De manière progressive, l'idée de l'hérédité de la « charge » royale s'installe dans la tête des dynasties des grands vassaux du royaume. Le principe théorique de l'élection par les vassaux subsistera jusqu'en 1179, date après laquelle on n'en parlera plus ... Les vassaux avaient saisi l'occasion de « se faire renvoyer l'ascenseur » en bénéficiant du même privilège ...
Pour le pape, pourquoi un tel glissement progressif ne s'est-il pas produit ?
Difficile de fournir une théorie. Cela provient peut-être du fait que les vassaux du royaume de France vivaient en contact fréquent avec leur roi : guerres incessantes, nécessité de rendre compte de l'administration de leur fief. Tandis que les cardinaux-électeurs du pape ne le rencontraient guère que lors de son élection, le pape étant alors un autocrate n'utilisant qu'un petit secrétariat d'État (la Curie) et renvoyant son monde (richement « doté ») juste après son élection. Il n'y avait pas ce contact permanent et sans doute affectif entre le futur héritier qu'aurait pu être le fils du pape (il en avait à l'époque) et les cardinaux, tandis que les grands du royaume voyaient sans cesse leur futur roi sous la forme d'un enfant.
De plus, canoniquement le pape est censé être désigné par le St. Esprit qui est supposé guider le suffrage des cardinaux lors de la désignation du « successeur de St. Pierre ». Le roi de France bien que sacré au nom de Dieu (selon la croyance) était (au moins au début, du temps des mérovingiens) seulement choisi et élu en raison de sa valeur militaire et administrative.
Donc, petit à petit l'idée d'hérédité royale a pu se frayer son chemin au motif de la sélection naturelle (le fils d'un homme doué est souvent doué). Et de plus au motif que cela laissait à ce fils le temps d'apprendre correctement son futur métier de roi ! Tandis qu'il n'était pas question canoniquement que les hommes puissent dicter son inspiration au St. Esprit, en lui « télécommandant » à l'avance un successeur papal en puissance : cela eut été un « blasphème »... Il fallait laisser le champ libre au St. Esprit, qui lui seul était capable de connaître le seul candidat digne de la fonction papale et de guider en conséquence la main des cardinaux lors du vote.
D'ailleurs encore aujourd'hui, c'est toujours le St. Esprit qui est censé désigner le pape. Sachant qu'hélas en pratique au Moyen-âge, c'était plus l'or largement dispensé des candidats papes les plus riches qui guidait le suffrage des cardinaux plutôt que le St. Esprit.
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