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« ...ni plus ni moins que les autres religions mais d'une façon bien plus perverse,
le christianisme n'aime pas l'humanité puisque la vraie patrie de l'homme est au Ciel et que la
voie royale pour y parvenir est le chemin de la croix et la haine de soi. »
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« " Dieu " est une hypothèse inutile, les religions des mystifications mortifères,
dangereuses et démobilisatrices et lIncarnation chrétienne, une irrationalité grotesque et
inhumaine. Place donc à un athéisme intelligent et généreux qui est une voie difficile, ô
combien difficile et en même temps exaltante. »
2009-04-26
« Ce que je reproche le plus au christianisme, cest dajouter à lopacité du réel la niaiserie dune explication. » Une fois passée la déferlante des bourdes papales (en attendant la suivante), une fois assourdies les éternelles chamailleries entre cathos progressistes et intégristes trisocomiques renvoyés dos à dos, cet aphorisme maison me tient encore plus à cur et mérite ici de nouveaux développements afin de passer à la moulinette toutes les sornettes chrétiennes.
En premier lieu, on doit bien admettre que parmi les trois grandes religions, le christianisme aggrave son cas. Car si « Dieu » sétait contenté dêtre YHWH, et Mahomet le prophète dAllah, on laisserait volontiers chaque communauté régler ses comptes avec le divin. Mais voilà, Jésus est passé par là : Dieu sest fait homme pour que lhomme se fasse Dieu (disait un Père de lEglise). Ni plus ni moins. Un Bon Dieu, passe encore, mais son rejeton ! Pure aberration génétique, illogisme consubstantiel. Doù ma consternation à lheure où le catholicisme relève la tête : pourquoi donc adjoindre toujours le grotesque à labsurde, la superstition de la lettre au ridicule de lesprit ? À lheure où la Pureté écologique tient lieu de nouveau dogme, comment ne pas souhaiter une salutaire marée noire dans cet océan deau lustrale et de guimauve spirituelle !
Car, Messieurs les Théologiens, parlons franc : ny a-t-il pas de quoi pouffer quand on consent à redevenir un instant sérieux pour résumer posément votre excentrique équation : « Dieu » en personne, votre Eternel, Essentiel, Immatériel Dieu a donc envoyé sur terre son propre Fils pour racheter lHumanité en perdition. CQFD. Et pourquoi pas sa bru ? O felix culpa ! (nous parlons de la Rédemption, pas de la dame.) En prétendant ainsi clôturer lhistoire des hommes, votre sotériologie a inventé une théologie de lHistoire ! Votre Eglise a de fait capturé le devenir de notre planète pour en faire sa chose : la seule Histoire Sainte possible. Secte originelle (victime ô combien consentante de sa propre réussite), le christianisme - qui est au Christ ce que le chauvinisme est au chauve ou la calvitie à Calvi - sest ainsi arrogé le droit du dernier mot et prétend le proclamer urbi et orbi en dincessants sermons, discours et exhortations quand ce ne sont pas dinflexibles restrictions morales concernant le sida, la fin de vie ou lavortement. Sous la redondance moralisatrice, toujours léblouissant tour de passe-passe et la fascinante métamorphose : tel le catoblépas, cet animal fabuleux des cathédrales qui se repaissait de sa propre chair, la prétention de la Tradition catholique - et son absurdité - sengraisse delle-même, indéfiniment, infiniment, impunément. Et nulle objection possible : lEglise aura forcément réponse à tout puisque « elle a les paroles de la Vie éternelle » ! Imparable logorrhée qui décourage toute contradiction car, dixit St Paul (qui, selon la même logique, sest autoproclamé « lavorton » tout en faisant main basse sur la jeune communauté balbutiante pour en faire « sa » chose et « son » combat), Dieu sest servi de ce qui est Folie pour proclamer sa Sagesse à toutes les nations jusquaux extrémités de la terre. Paradoxe formidable, génial coup de bluff auquel communie le croyant depuis vingt et un siècles : en se rassasiant dabsence, il se gave de sens ! Cest ce qui advient dans leucharistie, non pas simple commémoration, mais logophagie. Que ce soit dans la main ou sur la langue, sur le parvis de Notre-Dame ou dans la plus humble paroisse de brousse, il sagit bien pour le catholique fervent dabsorber une parole le Verbe fait chair de sen gaver, de lavaler au double sens du terme : bobard et hostie. Cest trivial et sublime. Nessaie pas de comprendre, crois seulement, abêtis-toi et gobe. Transsubstantiation, ya bon !
Que rétorquer à cette énormité chrétienne, sorte décurant loukoum ? Encore un petit effort, semblent susurrer les âmes pieuses : qui naimerait pas être sauvé ? Ressuscité dentre les morts ? Qui ne serait pas soulagé dabandonner définitivement son corps sexué (donc pécheur, pouah !) pour devenir une âme immortelle, défaillante de félicité dans léternelle garden-party céleste ? Paradisiaque Parousie qui fait délirer les frustré(e)s. Lathée convaincu dont lintelligence est blessée peut évidemment protester, contre-attaquer, démontrer, etc. À mon avis, cest assez vain et épuisant. Larme la plus forte, en définitive, plus fatale même que limprécation sacrilège, reste le rire, un rire iconoclaste dévastateur. Pimenté parfois de subtile ironie. Ironie déjà chez Pilate : « Quest-ce que la vérité ? » En tout cas plus la mienne, pas la vérité de la Croix en lieu et place du Phallus Pantocrator, pas lemblème de la déraison chrétienne qui, depuis lempereur Constantin et son étendard victorieux, prétend désormais désigner à lUnivers lenvers sublimé du réel : de maudite, la souffrance deviendrait rédemptrice et cest sur un gibet que désormais devraient être à jamais crucifiées nos trop humaines passions. Face à l« Ecce homo ! » (encore un mot de Pilate, décidément facétieux !), le Christ en Gloire des mosaïques byzantines. Revu et corrigé par la théologie, le prétendu Homme-Dieu retourne ainsi la réalité humaine comme un gant écorché : la souffrance est transcendée, le Destin défatalisé, lhomme divinisé. Nouveau contresens de lHistoire scellé par le sang de lAgneau. « Jai versé telle goutte de mon sang pour toi » parole sublime et très sotte que Pascal prête à Jésus-Christ. À ce stade, la foi nest plus une indigeste pièce-montée mais un amas décurants abats ! Foin de Sacré-Cur, disons les choses plus simplement : ni plus ni moins que les autres religions mais dune façon bien plus perverse, le christianisme naime pas lhumanité puisque la vraie patrie de lhomme est au Ciel et que la voie royale pour y parvenir est le chemin de la croix et la haine de soi.
En ce qui me concerne - puisque lathée a aussi le droit après tout dêtre témoin -, désormais joyeux athée à la mode de Prévert (A comme absolument athée, T comme totalement, H comme hermétiquement, etc.), mon seul vrai regret nest pas davoir défroqué trentenaire, non, mais de mêtre éclipsé trop tôt car ce nest pas en cinq ans ni même en vingt mais en quarante quon peut devenir un curé Meslier ! (On sait quen juin 1729 Jean Meslier, curé de la paroisse dÉtrépigny, laissa à sa mort une enveloppe contenant le texte fondateur de lathéisme et de lanticléricalisme militant en France. On imagine la tête de ses ouilles quil édifia et bénit durant tant dannées !!!) Sublime vocation : avoir le front et la persévérance de senkyster patiemment dans la croyance pour mieux la dissoudre de lintérieur, exténuer la foi moribonde sous le masque propret de la fidélité, sautotransfuser le doute-à-doute mortifère nuitamment, obstinément, voluptueusement
Aujourdhui en tout cas, en mon âme et conscience, ma conviction est faite : « Dieu » est une hypothèse inutile, les religions des mystifications mortifères, dangereuses et démobilisatrices et lIncarnation chrétienne, une irrationalité grotesque et inhumaine. Place donc à un athéisme intelligent et généreux qui est une voie difficile, ô combien difficile et en même temps exaltante. Dailleurs nest-il pas urgent dinventer un nouveau qualificatif positif et mobilisateur qui effacera à jamais tous ces préfixes privatifs défigurant notre humanisme et notre éthique (athée, incroyant, apostat etc.). Certes, celui qui réfute toute transcendance nest pas, par définition, subversif, encore moins prosélyte, mais dans un monde dominé par le retour intempestif et bruyant de lobscurantisme religieux, il le devient. Il a même à opérer durgence une sorte de coming-out pour proclamer dorénavant haut et fort ses lettres de noblesses et sa feuille de route : non plus un frileux agnosticisme mais un vigoureux athéisme énoncé en termes positifs, quils soient savants ou familiers : MÉCRÉANT, DÉICIDE ou THÉOCLASTE ! Le proclamer mais aussi le vivre, pas sur les tréteaux ni dans les flonflons, mais au quotidien, en se défiant des idoles et en refusant de sinventer des édens. Et en incarnant ici et maintenant la fraternité, la justice, la liberté et la laïcité, les quatre vertus cardinales de notre vivre ensemble.
Telle est ma foi dapostat. Telle est ma fierté dex-croyant dégrisé et dhomme de raison parvenu enfin à maturité. En comparaison, tous les dévots de la planète, avec leurs grigris, leurs sacrements, leurs amulettes, leurs processions, leurs miracles, leurs vieux grimoires, leurs indulgences plénières, leurs moulins à prière, leurs grottes miraculeuses, leurs murs sacrés et leurs esplanades du temple, leurs carêmes et leurs ramadans, leurs mitres, leurs kippas ou leurs chapeaux pointus tous ne sont à mes yeux que de grands gosses qui ont peur dans le noir et se rassurent à bon compte en ânonnant des fables à dormir debout et à croupir à genoux.
« Pour une larme versée sur le Dieu que je perds, mille éclats de rire au fond de moi fêtent la divinité qui maccueille partout. » Jai mis cette citation en exergue de mon site littéraire. On dirait encore du Pascal mais cette phrase, le coquet Jouhandeau « le diable de Chaminador » comme on lappelait ne la cousait pas dans la doublure dun manteau élimé : il la vivait jusquà lacmé de ses amours interdites après avoir tant rêvé comme moi de devenir prêtre. Avec néanmoins une différence capitale entre Jouhandeau et moi : sil a toujours exalté le péché de chair dans le commerce des garçons avec quelle vitalité et sans aucun remords jusquà un âge avancé ! jamais il ne renoncera à ce Dieu quil bafouait allègrement. Son péché et son Dieu feront toujours bon ménage, avec force accommodements. Au point que, durant les dernières années de sa vie, lauteur citera cette phrase des Maximes de St Jean de la Croix : « Une seule pensée de lhomme vaut plus que le monde, mais Dieu seul est digne den être lobjet. » Dieu seul ! (Excusable erreur de vieillesse puisque, face à la mort, maints écrivains jusque là lucides et sensés deviennent sur le tard cathooliques chroniques et mysticogélatineux !) Et Jouhandeau dajouter dans ses entretiens avec Jean Amrouche, cette fois plus sérieusement et avec une lucidité qui rejoint la mienne : « Dans ma jeunesse, jai peut-être aimé le Christ dune manière trop sensible. Son visage et son corps mont requis trop longtemps, beaucoup trop. Mon homosexualité vient de là. » Le visage et le corps du divin supplicié son sexe aussi, si peu voilé, si mystiquement offert à mon regard pubère, si délicieusement crayonné dans la marge de mes cahiers décolier. Là encore : felix culpa ! Car je confesse moi aussi ma foi intacte en ce Ieschoua dAmour qui me troubla. Son Eglise, non ! Non merci ! Plus jamais ! Rejet viscéral à la mesure de lépoustouflant paradoxe : la même Institution qui diabolise lhomosexualité et la condamne me la transmise en douce, le milieu sacerdotal étant majoritairement homophile et hypocrite. Cest devenu mon constat après quelque trente ans de désintoxication méthodique et assidue. Un constat non pas amer, plutôt serein et même radieux : plus de prêtrise, nulle religion, nulle divinité, ni Incarnation ni Rédemption, ni péché ni grâce, nulle Eglise - marâtre ou virago - lHomme seul. Charnel et périssable. Pitoyable et sublime. Enfin affranchi ! Cest en Lui seul que je crois. Et à foi neuve, catéchisme inédit : le contraire de prier ? Rire. Le contraire de mourir ? Jouir. Le contraire de croire ? Savoir.
Et le faire savoir, non plus en chaire mais dans ma chair, en péchant vigoureusement et en pouffant irrespectueusement puisque lhygiène du nouveau siècle - qui sera athée ou ne sera pas - cest le blasphème joyeux !
M. Bellin ce 25/04/2009
Site : www.michel-bellin.fr
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